Ordinateurs quantiques : qui en possède ? Découvrez les propriétaires et leurs avancées

Quarante-sept. C’est le nombre d’ordinateurs quantiques recensés dans le monde, selon les estimations les plus récentes. Une poignée de machines, farouchement gardées par des industriels pionniers, quelques États stratèges et une constellation de laboratoires à l’avant-garde. Derrière ces chiffres, une lutte technologique à huis clos : IBM, Google ou Rigetti en chefs de file, les gouvernements américains et chinois en chefs d’orchestre, l’Europe en challenger déterminé.

Pour accéder à ces bijoux d’ingénierie, mieux vaut faire partie d’un consortium de recherche ou d’un cercle restreint de partenaires triés sur le volet. Quelques privilégiés bénéficient d’un accès via le cloud, mais la plupart des prototypes dorment encore dans l’ombre feutrée des labos, à bonne distance d’un usage commercial à grande échelle.

Ordinateur quantique : comprendre les bases et les enjeux actuels

L’ordinateur quantique bouleverse la donne du calcul. Contrairement aux machines traditionnelles, qui fonctionnent sur la base de bits classiques, ces 0 et 1 familiers,, les ordinateurs quantiques utilisent le qubit. Un qubit n’est pas limité à un seul état : il peut représenter à la fois 0 et 1 grâce à la superposition, ce qui démultiplie la capacité de traitement à mesure que le nombre de qubits augmente.

Deux concepts sont au cœur de cette technologie : la superposition bien sûr, mais aussi l’intrication quantique. Ce phénomène, parfois contre-intuitif, permet à deux qubits d’être liés de manière telle que l’état de l’un détermine instantanément celui de l’autre, même séparés par des kilomètres. En laboratoire, cette propriété s’est révélée précieuse pour accélérer des calculs hors de portée des architectures classiques.

Un autre atout du quantique : l’effet tunnel. Il autorise les qubits à franchir des barrières énergétiques que les bits classiques ne pourraient jamais traverser, ouvrant la voie à un calcul de masse exécuté en parallèle.

Élément Rôle
Qubit Permet la superposition et l’intrication
Effet tunnel Facilite le passage d’états et le calcul parallèle

Avec ce potentiel, les ordinateurs quantiques pourraient pulvériser les performances des machines classiques pour des usages comme la cryptographie, la simulation de molécules ou l’optimisation de réseaux logistiques. Mais la route est longue : faire fonctionner un nombre croissant de qubits, garantir leur stabilité, corriger les erreurs qui surgissent… Les défis s’accumulent et réclament la synergie des physiciens, des informaticiens et des ingénieurs de génie.

Qui détient aujourd’hui un ordinateur quantique ? Panorama des principaux propriétaires

Qui possède aujourd’hui un ordinateur quantique ? Le panorama mondial reste dominé par quelques poids lourds, du secteur privé comme du secteur public, principalement entre les États-Unis, la Chine et l’Europe.

Du côté des entreprises, la Big Tech occupe le devant de la scène. IBM propose l’accès à sa plateforme IBM Quantum et commercialise des machines telles que le Q System One. Google a marqué l’histoire avec Sycamore et poursuit ses avancées avec Willow, intégrant des innovations majeures pour la correction d’erreurs. Microsoft s’appuie sur Azure Quantum, combinant la puissance du cloud et du quantique, pendant qu’Intel développe Tunnel Falls, misant sur les qubits à spin de silicium.

Voici un aperçu des principaux acteurs spécialisés et de leurs orientations :

  • D-Wave mise sur le recuit quantique et propose depuis 2011 des machines telles que D-Wave One.
  • Rigetti Computing, IonQ et Quantinuum (fruit de l’union Honeywell-Cambridge Quantum Computing) illustrent la vitalité de nouveaux entrants misant sur des architectures hybrides ou les qubits à ions piégés.

En Chine, l’Université des sciences et technologies affiche ses ambitions avec Zuchongzhi-2 et Xuchongzhi-3. Le groupe China Telecom Quantum Group fait parler de lui avec le Tianyan-504, la plus grande machine quantique chinoise connue. Côté France, la dynamique prend de la vitesse : Pasqal, Quandela et Alice & Bob avancent, soutenus par le plan quantique national et le programme EuroQCS France porté par l’Union européenne. Le CEA se distingue parmi les centres de recherche, alors qu’Amazon, via Amazon Braket, propose un accès à ces ressources, sans toutefois posséder sa propre machine.

États-Unis et Chine caracolent en tête dans l’informatique quantique, mais l’Europe n’a pas dit son dernier mot. Startups et initiatives publiques dessinent peu à peu une alternative crédible sur cette scène mondiale en pleine effervescence.

Des avancées majeures : comment les acteurs du secteur repoussent les limites

Le secteur de l’informatique quantique connaît une accélération inédite. L’annonce retentissante de Google en 2019 sur la suprématie quantique avec Sycamore a marqué les esprits : un calcul exécuté en seulement quelques minutes, qui aurait nécessité des milliers d’années pour un supercalculateur traditionnel. Un jalon contesté, certes, mais qui a redéfini les ambitions de toute la filière.

IBM n’est pas en reste, avec ses processeurs Condor et ses plateformes ouvertes comme Qiskit. Priorité : stabiliser les qubits, en augmenter le nombre, limiter la décohérence. Intel explore les qubits à spin en silicium avec Tunnel Falls, cherchant à s’aligner sur les standards industriels du semi-conducteur. De son côté, Microsoft tente un pari audacieux : les qubits topologiques avec le projet Majorana 1. Objectif : des qubits intrinsèquement robustes, moins vulnérables aux erreurs.

La Chine intensifie sa riposte. Zuchongzhi-2 et Xuchongzhi-3 rivalisent avec les machines américaines, tandis que le Tianyan-504 s’impose par ses dimensions. Ces progrès s’accompagnent d’un effort considérable sur la correction d’erreurs, indispensable pour rendre les calculs quantiques exploitables à grande échelle.

La France, elle, avance sur plusieurs fronts : atomes neutres chez Pasqal, photons chez Quandela, qubits protégés contre la décohérence chez Alice & Bob. Ces stratégies, portées par l’État et l’Europe, illustrent la diversité des approches pour franchir la prochaine étape du calcul quantique.

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Vers quelles applications et défis pour l’informatique quantique de demain ?

Les applications de l’informatique quantique dépassent désormais la fiction. Les premiers usages s’esquissent dans les domaines où la puissance de calcul conventionnelle atteint ses limites. La cryptographie post-quantique devient une priorité pour anticiper la menace que font peser ces machines sur les protocoles de chiffrement actuels. Entreprises et institutions se mobilisent pour élaborer de nouvelles méthodes sécurisées.

La simulation moléculaire promet un saut de géant dans la conception de matériaux et de médicaments, là où la modélisation classique s’essouffle. Les avancées en chimie quantique, en recherche pharmaceutique ou dans la découverte de nouveaux catalyseurs s’appuient déjà sur des algorithmes expérimentaux taillés pour ces machines. Sur le terrain de l’optimisation logistique, la complexification des calculs atteint vite le plafond des architectures classiques : chaînes d’approvisionnement, trafic ou finance, chaque variable supplémentaire multiplie la difficulté.

L’intelligence artificielle n’est pas en reste. Les algorithmes quantiques pourraient accélérer l’apprentissage automatique, ouvrir de nouvelles perspectives pour le traitement du big data. Mais, à chaque étape, la détection et la correction d’erreurs s’imposent comme un mur : le moindre bruit, la moindre perturbation perturbe les qubits et impose des techniques sophistiquées pour assurer la fiabilité.

Les politiques publiques, à travers des initiatives comme le Plan Quantique en France ou les programmes européens, structurent la filière et encouragent l’innovation. Des chercheurs comme Landry Bretheau, Loïc Henriet ou Maud Vinet le rappellent : la bataille ne se résume pas à la seule puissance de calcul. L’industrialisation, la reproductibilité et l’accès élargi aux ressources quantiques restent à conquérir.

Devant ce front technologique, une certitude : le quantique n’a pas livré tous ses secrets. Ceux qui tiennent déjà les clés de cette révolution sont loin d’avoir dit leur dernier mot. Le jeu reste ouvert, l’enjeu colossal : façonner la prochaine génération d’ordinateurs, capables de résoudre l’impossible.